Homéoparthie et Architecture

        J’ai écrit1 ailleurs que l’on peut préciser le type sensible d’un artiste à travers ses œuvres, par exemple un musicien derrière ses notes, un sculpteur à ses productions, j’ai noté que les tableaux et le tempérament de Pablo Picasso s’apparentent au remède Sulfur, ceux de Salvator Dali à Arsenicum album, ceux de Velasquez à Calcarea carbonica. L’on peut élargir ce propos à toute œuvre, depuis les magnifiques réalisations antiques, celles de la Haute Egypte en tête, jusqu’aux constructions actuelles qu’elles soient réussies ou totalement ratées.

       Restons sur ce dernier point, celui des constructions ratées. Prenons appui sur un quartier de ma commune où ont été élevés des immeubles à angles acérés, aux fenêtres exigües, aux intérieurs découpés en chambres étroites et angulaires, les extérieurs en lames coupantes, une horreur sur une grande superficie pour une population en nombre. Une commande validée par une ex-équipe municipale, au départ désireuse d’appartements distincts par leur volume, leur disposition, leur distribution, les immeubles étant bordés de végétations, de ruelles, de placettes, le tout pour faciliter la proximité, la vie collective et les échanges. De fait, l’architecte avait appliqué les consignes, il avait construit des appartements tous distincts, chacun unique et sans jumeau, il avait bien conçu l’arborisation du lieu, les aménagements extérieurs. L’enquête d’opinion après livraison des travaux avait montré des locataires séduits, des appartements agréables, des prolongements extérieurs satisfaisants et une vie de quartier paisible.                         

       Passent 10 ans, nouvelle enquête d’opinion et coup de tonnerre : le blâme est unanime, les habitants dénoncent les mal façons, l’humidité, l’usure rapide, la très laide distribution intérieure des appartements, ils accusent la délinquance, les  dépravations, les vols et autres insécurités. Leur quotidien est devenu un enfer, beaucoup déménagent laissant leur appartement vacant et impossible à louer. Même les militants sont partis. Alors quoi ? Que s’est-il passé ? Les raisons du fiasco sont multiples. Voici en vrac :  

            * peu ou pas de concertation préalable avec les futurs locataires ; projet confié à un architecte reconnu mais malade (son fils prendra le relais) ; ligne généreuse, sociale, altruiste mais trop centralisée et trop marquée politiquement.

                 * beaucoup d’œuvres prévues au départ manquent comme le "complexe de lecture et de spectacles", la proximité avec la maison communale, la réalisation des pôles commerciaux, artisanaux, industriels (du fait aussi du coût flambant des charges et des chocs pétroliers des années 70).

              * il y a surtout ceci : aucune recherche d’harmonie au sens spirituel du terme et aucune interrogation sur le type sensible du maitre d’œuvre. Voyons ces deux points :

            - l’harmonie entre environnement, constructions et êtres occupant les lieux est essentielle. Pour y parvenir, les proportions, les lignes, les formes doivent répondre à une répartition juste des forces douces Yin et des forces vigoureuses Yang, à leur alliage régulier à l’intérieur et à l’extérieur du bâti. Bien sûr, l’idéal serait de conjuguer le tout selon le nombre d’or qui défini le rapport idéal, quasi-mystique, entre longueurs et largeurs. Aujourd’hui, on y fait peu cas alors que là se trouve un vrai socle de beauté et d’harmonie. L’influence bénéfique d’un tel bâti sur l’humain ne laisse, à mes yeux, aucun doute.

               -  le type sensible du maitre du projet est l’autre critère utile. Le type sensible d’un sujet correspond à son remède homéopathique dit de fond. C’est l’ensemble de ses signes sensoriels et psychiques, sa façon d’être au monde. Par exemple, l’individu de type Sulfur est décrit comme un être irrésolu, oublieux, égoïste, prétentieux, mélancolique mais surtout jovial, communiquant, sociable, inventif, autonome, philosophe, chercheur de sens, dormant peu, parlant beaucoup, aimant la charcuterie, la pâtisserie, le bon vin, etc. Un épicurien généreux, affable, ouvert aux hommes et à la vie. Un être adéquat pour mener à bien des projets à la fois concertés, chaleureux et humanistes. Ainsi, le type Sulfur, à la fois liant et perceptif, est un des types sensibles à retenir pour des habitats d’ensemble où doivent régner solidarité, sagesse et harmonie.

         Bien sûr, il existe bien d’autres types sensibles compatibles avec cette tâche. Le type Phosphorus, Calcarea phosphorica, Phosphoric acidum et autres conviendraient parfaitement. Mon but n’est pas d’en faire la liste, il est seulement de montrer un exemple-type d’équilibre et de bien être pour le meilleur en matière d’habitats.

         Je termine ce bref propos en laissant de côté les questions qui fâchent comme celles-ci : au final, qui choisit le maitre d’œuvre ? quels acquis spirituels pour exercer la fonction? quels modes de recrutements ? quels examens ? entretiens ? quels observateurs ? décideurs ? Mille questions pour définir une conduite claire, appropriée et efficace. Il n’empêche, malgré les difficultés voire l’impossibilité, malgré le caractère chimérique ou insensé d’une telle entreprise, il m’est bon d’y voir une utopie parfaitement réalisable pour notre bien-être. Avec, de surcroit, le recours bénéfique (mais non exclusif) de la science homéopathique.  

                                                                                Juillet 2024


[1] Moulay KAICI : Le Livre des Résumés – Editions Vérone, pages 98 à 101

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